Serge Revial : « Pour contrer la crise sanitaire et la crise climatique, nous avons des solutions. »

 Dans Savoyard de coeur

Très tôt initié aux métiers de l’hôtellerie, Serge Revial fait son apprentissage auprès de ses parents et gravit tous les échelons. En 1996, il prend les rênes de l’établissement que son père a fait construire dans les années 60. Premier adjoint de Tignes pendant 6 ans, il se consacre aujourd’hui à sa première mandature de maire en « associant les intelligences » autour d’un Plan neige ambitieux et il voit loin, malgré la crise.

 

Le parcours de Serge Revial semblait tracé : école hôtelière de Thonon, bac éco, salarié de 1985 à 1995, vingt-trois ans de gérance avec l’ambition de faire prospérer l’affaire familiale. Ascenseurs, salons, restaurant, salle de fitness, piscine couverte… Les aménagements se multiplient, le Gentiana passe de sept employés en 1985 à vingt-trois personnes en quelques années.

 

La relation humaine au premier plan

C’est dans ce contexte de développement rapide que Serge Revial construit une équipe et forge sa méthode de management. « Pour être exemplaire, un dirigeant doit être présent le matin avec les premiers, le soir avec les derniers. Il faut être solide, travailler de 8h à minuit et rester à l’écoute pour comprendre les problématiques des employés. Dans notre filière, le travail est difficile mais notre personnel appréciait l’atmosphère familiale qu’il retrouvait chaque année. Nous mettions tout en œuvre pour le bien-vivre ensemble, la reconnaissance du travail et l’évolution des carrières. »

 

Un management qui inclut la diversité

Serge Revial a joué sur les contrastes – sensibilité et rigueur, souplesse et intransigeance –

pour donner à sa fonction de dirigeant les contours d’une aventure humaine durable. Il s’est engagé à « créer du lien entre les différentes origines sociales. Lorsqu’un déséquilibre dans les équipes générait des tensions, on allait se détendre au bowling après le travail pour que les gens se parlent et se connaissent mieux. Chacun a des barrières à franchir. Cette ouverture aux autres, je l’ai apprise au service militaire. Quand on passe un an avec trente hommes à dormir dans la neige, à construire des igloos, à skier la nuit au clair de lune sans avoir les mêmes aptitudes physiques ni mentales, on fait face tous ensemble et on s’en souvient. »

 

D’hôtelier à maire, le « fil rouge » de l’humilité

Pour Serge Revial, l’art de composer une équipe d’élus consiste à associer des valeurs et des compétences diverses. « J’ai appris cette conjugaison avec mes parents, avec les chefs de cuisine, les plongeurs les serveurs, les valets de chambre… Un seul homme ne peut pas tout faire, il faut faire preuve d’humilité. Mes adjoints viennent d’horizons différents, moi j’apporte mes convictions, mon engagement. A mon poste de premier adjoint, j’ai travaillé sur la finance et sur les Ressources Humaines. En tête de liste, je voulais apporter de la cohésion sociale dans la collectivité et donner un rôle important à cette unité. Ce que je vise, c’est la collaboration de tous les services communaux. »

 

Une saison blanche, le fil rouge de la ténacité

Avec ses 30 000 lits, 54 % de clientèle étrangère, un domaine skiable relié à celui de Val-d’Isère, Tignes figure parmi les plus prestigieuses stations françaises. En 2020, les réservations étaient en progression de 15 % par rapport à octobre 2019. Le confinement du 15 mars 2020 a raccourci la saison de six semaines et plongé les 2 500 habitants de la commune – et près de 4 000 saisonniers – dans l’inconnu, avec une perte de chiffre d’affaires inédite de 30 % sur tous les secteurs d’activité. Dès l’été, « tout était bien reparti avec une hausse de 10% d’activité par rapport à la saison estivale 2019 ».

Serge Revial avait investi 110 000 € pour préparer la saison d’hiver et le 17 octobre les remontées mécaniques menant au glacier étaient ouvertes. « Nous avions une très belle avant-saison. On avait enneigé des pistes. Et puis le re-confinement du 29 octobre a brisé cet élan. Si nous pouvions travailler sur la fin de saison, la reprise aurait un impact majeur sur le moral de la population. Tout notre écosystème est chamboulé et les saisonniers, locaux ou pas, vont devoir tenir. »

 

Un « plan B » immédiat

Pour résister lorsque les remontées mécaniques ont été fermées, le panel d’activités de la station s’est élargi. Même si, selon Serge Revial « le ski alpin représente 85% de l’attractivité de la destination pour la clientèle », un sursaut s’est organisé. 20 km de piste de randonnée sécurisée ont permis aux vacanciers de s’immerger dans le paysage à pied, en raquettes, en ski de fond. Ce nouvel itinéraire s’est animé avec des courses de randonnée, une patinoire naturelle a attiré les familles, tout comme le curling, le ski joring, la location de vélo électrique, de luge, la traversée du lac naturel, la plongée sous glace…

 

Une vision à moyen terme

« Diriger une municipalité pendant une crise sanitaire est compliqué, admet le maire de Tignes, il faut s’adapter à chaque annonce gouvernementale, piloter à vue. » Dans la station, les restaurants ont fait de la vente à emporter, les boutiques de la vente en « click & collect ». « Chacun a pris conscience que la montagne est belle et qu’il faut la chouchouter. Notre Plan neige prévoit quatre nouvelles remontées mécaniques d’ici 2026. Nous allons réhabiliter des terrains de sport et lancer la mise en œuvre de parcours sportifs : des pistes de vélos électriques, une passerelle himalayenne sur les rives du barrage près de Val d’Isère. »

 

Une perspective à long terme

Au-delà de la crise sanitaire, Serge Revial veut sauver la station des effets négatifs du réchauffement climatique. Son idée : construire une seconde centrale hydro électrique pour activer des canons à neige qui permettraient au glacier de la Grande Motte d’attirer les visiteurs, été comme hiver. « Malgré les prédictions des scientifiques qui voient l’avenir de nos stations compromis, j’aimerais que nos petits enfants continuent de vivre dans cet environnement exceptionnel du Parc de la Vanoise. Je lance un cri d’alarme : en 25 ans, notre glacier a perdu les trois quarts de sa masse. Or la technologie peut le sauver : en récupérant l’eau de fonte, nous pourrions le ré-enneiger en permanence. Pour en faire un site de contemplation l’été, avec un merveilleux pont suspendu à 3450 m d’altitude. Et pour qu’il accueille les skieurs chaque hiver, nous devrions veiller à ce qu’il ne fonde plus. »

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