Stéphane Vidoni : « La convivialité est une clé de résilience pour nos stations, nos hôtels, nos familles. »

 Dans Savoyard de coeur

Stéphane Vidoni a grandi derrière le bar de ses parents, au pied des Pyrénées. Après des emplois saisonniers sur les côtes basques et landaises, il grimpe à 18 ans dans la hiérarchie du groupe Accor avant d’ouvrir son premier hôtel à Megève avec Véronique, son épouse et associée. Ensemble, ils mènent une carrière tout schuss et slaloment entre les obstacles de la crise Covid.

Votre parcours est-il aussi linéaire qu’il en a l’air ?

Pas vraiment… au lycée je séchais les cours ! Tout a été plus simple pour moi après le bac ! J’ai suivi les formations internes proposées par le groupe Accor pendant 14 ans et j’ai même décroché un MBA (Master Management de Projet) de la Cornell University of New York tout en travaillant ! Le groupe Accor m’a confié ma première direction d’hôtel à trente ans, aux pieds des Alpes. J’ai rencontré ma femme à l’hôtel Mercure de Pau, elle était  réceptionniste. Nous avons poursuivi notre itinéraire professionnel ensemble, à Avignon en 1998, puis à Aix-les-Bains. Nous avons eu le coup de foudre pour le cadre de vie montagnard et nous avons décidé de nous installer en station.

L’hôtellerie et la vie de famille sont-elles vraiment compatibles ?                                       

Nos deux filles aînées étaient déjà nées, à Bordeaux, quand nous avons repris un petit hôtel restaurant à l’entrée de Megève, avec seulement douze chambres. Mon épouse s’occupait de la réception et du service en salle. Moi je faisais la cuisine et la maintenance. Notre premier fils est né à Aix-les-Bains et les deux derniers à Sallanches. La famille s’est agrandie en même temps que notre activité mais nous nous sommes organisés pour qu’elle reste centrale. C’est d’ailleurs grâce à notre fils Eloi que notre projet hôtelier s’est accéléré. Quand nous sommes arrivés à Megève, il est devenu copain avec deux jumeaux. Nous avons rapidement sympathisé avec leurs parents, Glen et Claudia, un couple londonien fou de ski. Autour d’une pizza, ils nous ont proposé d’investir dans un premier établissement et nous avons acheté l’hôtel Mercure de Val Thorens en 2015. Nous l’avons exploité sous cette enseigne pendant un an, puis nous avons fait de gros travaux et lancé Fahrenheit 7*, notre hébergement idéal.

* Fahrenheit 7 ou -13.89 degrés Celsius est la température de création du flocon parfait.

 Entre vous et vos amis anglais, c’est une histoire de confiance ?                                          

Tout à fait. Nous nous sommes engagés avec la création d’EVidents, une société de développement immobilier, spécialisée dans l’hôtellerie de loisir à la montagne, qui monte des projets de reprises ou de créations d’actifs hôteliers. Je dirais que l’amitié qui lie les Vidoni et les De Unger inspire l’état d’esprit Fahrenheit 7. Notre concept respire l’hospitalité et nous l’avons reproduit sur trois sites. A Val Thorens, avec 108 chambres, deux restaurants, trois bars, une cuisine complète. A Courchevel, où nous avons ouvert un hôtel en 2017 et aux Menuires où nous avons créé le restaurant Roc Seven en 2019.

 Quel est le trait d’union qui relie les trois destinations ?

L’ambiance et la décoration. Véronique a mixé les clins d’œil vintage 70’ et le style urbain, loin du cliché du chalet savoyard avec ses cœurs, ses bancs en bois et ses nappes à carreaux. Nous voulions une décontraction 4 étoiles, une excellence anticonformiste, du cocooning, de la fête et un accès immédiat à la glisse sur les Trois Vallées, aux pieds des pistes.

Comment avez-vous géré l’arrivée de la crise liée à l’épidémie de Covid-19 ?                   

Nous étions sur la pente ascendante. Nous avions ouvert le Roc Seven depuis trois mois et demi et nous avions eu tout de suite énormément de succès. Quand nous avons tout fermé, le 15 mars, nous nous sommes reposés en famille. Rapidement, nous avons compris qu’il ne serait pas viable d’ouvrir en été. Les hôtels et le restaurant d’altitude sont restés clos. Nous étions loin d’imaginer que l’hiver 2020 serait aussi compliqué ! Nous avions tout préparé pour cette saison : le recrutement des équipes, la communication. La commercialisation a commencé, et puis… l’équipe de réservation a dû rembourser les arrhes.

 Vous n’avez jamais rouvert vos établissements ?                                                                      

Juste deux semaines pour accueillir des équipes sportives. A l’occasion de la Coupe du monde de ski alpin féminin de Courchevel et de la Coupe du monde de ski cross de Val Thorens, en décembre. J’ai proposé cet accueil pour les athlètes parce que je suis aussi Président de la Freeski des Belleville et très engagé auprès du Club des Sports de Val Thorens pour le développement du ski. Nous avons fait tourner le restaurant qui est sur le front de neige Courchevel 1650, pour 10 jours de vente à emporter à Noël et 4 semaines pendant les vacances de février.

Quels sont les points positifs de cette période inédite ?   

Nous avons fait un bilan, en couple, et nous avons fêté nos 50 ans ! Mes trois fils sont membres du ski club de Val Thorens ; Eloi qui a 18 ans est freerider professionnel. Ils n’ont pas pu skier mais nous nous sommes retrouvés. Nous avons repensé notre quotidien. Avec Véronique, nous avons décidé de calmer notre rythme, effréné depuis 15 ans. Nous voulons déléguer pour nous projeter sur les 15 prochaines années. Nous sommes entourés de passionnés de l’hôtellerie comme nous et nos équipes sont fidèles. En pleine saison, nous tissons des liens avec 130 personnes et notre staff permanent de 12 personnes nous accompagne toute l’année pour la gestion financière, l’administratif et la commercialisation. Nous avons formé des managers sur lesquels nous pouvons compter.

Comment voyez-vous l’avenir ?                                                                                                         

On ne veut pas s’arrêter là et on a profité de cette période pour développer d’autres projets, dont une construction aux Menuires. Nous travaillons avec des partenaires comme la Compagnie des Alpes pour poursuivre notre aventure. Nous préparons l’été avec la Mairie et le Service des sports de Courchevel parce que la station dispose de très belles infrastructures d’entraînement. La mise au vert en juillet/août pourrait faire partie des programmes des équipes de haut niveau. Nous allons aussi prolonger nos conditions de réservation flexibles. D’une manière générale, nous devons évoluer vers plus de souplesse, plus de diversité.

 Comme les stations qui veulent sortir du tout-ski, vous renforcez votre diversification ?        

Bien sûr ! Chaque secteur se pose la même question : que faire en dehors du ski alpin pour étoffer notre activité ? La convivialité fait l’intérêt et la base de notre métier ; c’est pour cela que nos adresses sont reconnues et ont été récompensées par différents prix dans l’industrie du tourisme. La programmation musicale de notre bar Le Zinc attire les touristes et les locaux. Elle fait partie de l’après-ski décontracté de Val Thorens. On peut vivre la montagne de différentes façons et se retrouver pour des moments de partage en famille ou entre amis.

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