La pratique des raquettes, du ski de randonnée et du vélo électrique dopée par la crise Covid

 Dans Éco

Privés de télésièges, les amateurs de ski alpin ont découvert d’autres modes de déplacement. Ils ont glissé, roulé, patiné… et au bout de la piste, ils ont pris le temps d’admirer les sommets. Pour répondre à la demande des sportifs montés en station pour « vivre la montagne autrement », les fabricants savoyards ont accéléré la cadence.

 

Tempête sanitaire

Les 1200 commerces de montagne représentés par l’USC (fourniture, location et vente d’équipements), affichent une chute d’activité de 73 % pour cette saison 2020-2021 par rapport à l’hiver précédent. Un bilan brutal qui rappelle à quel point l’économie de la montagne dépend du ski alpin, durement touché. L’exemple de Rossignol, leader mondial du marché du ski, est parlant. La marque qui possède trois sites industriels en France dont un en Haute-Savoie (50 % de l’effectif du groupe avec 1400 salariés) a vu son chiffre d’affaires dégringoler de 59,8 M€ en 2019 à 26,1 M€ en 2020. Et son prévisionnel 2022 ne dépasse pas 18,3 M€ hors textile…

 

L’ascension du ski de randonnée

Le contraste entre les deux skis est saisissant. Quand le ski alpin souffre, le ski de randonnée confirme une progression amorcée il y a dix ans et prend le lead avec la fermeture des domaines skiables. Le fabricant de fixations Plum, basé à Thyez, a répondu cet hiver à une demande sans précédent. Dès la fin du mois de novembre, le haut-savoyard a doublé son chiffre d’affaires de décembre 2019. Albert Félisaz, le fondateur de Félisaz SAS (mécanique de précision) et de la marque Plum a dû embaucher une trentaine de salariés pour fabriquer ces fixations qui nécessitent l’assemblage manuel de 80 pièces. L’offre a été concentrée sur deux produits phare pour livrer un réseau de 1 000 magasins : des détaillants de station et grandes enseignes de sport. Avec plus de 15 000 paires vendues, l’entreprise misait sur un CA de 4,5 M€ au 31 mars 2021.

 

La raquette en lévitation

Le leader mondial de la raquette à neige TSL (Thônes Sports Loisirs) Outdoor a vu lui aussi ses ventes s’envoler et il a quadruplé ses effectifs (80 personnes) pour satisfaire les commandes. Pour produire 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, Philippe Gallay, le PDG de TSL originaire de La Clusaz, a fait appel aux moniteurs de ski, aux employés des remontées mécaniques et de l’hôtellerie-restauration qui se retrouvaient sans travail. Il a pu ainsi fournir les grandes chaînes (Décathlon, Intersport, Au Vieux Campeur…), les magasins de sport indépendants et surtout, il a conquis l’Amérique ! Les ventes aux États-Unis et au Canada ont bondi de 500 % (40 000 paires contre 8 000 en 2020) dans près de 300 magasins.

 

La pandémie a servi de catalyseur pour l’envie de nature

La tendance de fond qui a déferlé sur la montagne a fait le succès de TSL : le leader des raquettes à neige s’adjuge 70 % du marché en France et 35 % du marché mondial. Fin novembre, les commandes reçues atteignaient un pic de 10 000 paires par jour, contre environ 1 000 à 1 500 habituellement. Depuis les ateliers d’Annecy-le- Vieux, où la fabrication va de l’injection plastique au montage, 2 500 à 3 000 paires ont été envoyées chaque jour dans le monde, dont la moitié en France. A la fin de l’hiver, l’entreprise prévoit qu’elle aura vendu 200 000 paires pour un chiffre d’affaires de 12 M€, en croissance de 15 %.

Le vélo à assistance électrique (VAE) grimpe encore plus vite                                               Un autre sport en plein essor, le VAE, gagne les villes et les pentes. L’hiver sans ski et l’été au vert lui ont ouvert une voie royale. Une trentaine de destinations de Savoie Mont Blanc ont proposé la location de vélos ou VTT à assistance électrique. La Clusaz, Le Grand Bornand, Chamonix, Val d’Isère, Courchevel, Tignes… ont vu venir le phénomène.

Séduits par le VAE, les amateurs ont investi et les fabricants ont innové

Dans la région, de nombreux ateliers gérés par des passionnés déploient un savoir-faire pointu, comme celui de l’Atelier Titane (Grade9 à La Motte-Servolex) dont la vocation principale est la soudure de cadre titane pour le vélo et le montage de roues artisanales.

A Annecy, les Ateliers Héritagebike ont été créés en 2019 par Xavier Wargnier, fondateur des Sommets du digital et des éditions Kawa, et le designer Guillaume Monsigny. Ils conçoivent des VAE aux allures de motos vintage. Leur fabrication manuelle haut de gamme associe des matériaux nobles comme le cuir des Alpes ou la fibre de carbone et nécessite une cinquantaine d’heures de travail pour chaque vélo. La production 2021 ne devrait pas dépasser 150 pièces, commercialisées en ligne ainsi que dans une sélection de boutiques Fusalp.

A Chavanod, les premiers prototypes WhaTT ont été testés en 2016. Ils ont dévalé les pentes et flâné à Annecy pour définir leur roulage parfait, en milieu urbain et outdoor. Les ingénieurs ont imaginé la technologie Twin Transmission (double transmission), les designers ont rassemblé les pièces et formalisé cette intégration. Les ambassadeurs de la marque sont évidemment des sportifs, dont le plus connu est le champion de la coupe du Monde 2020-2021, Alexis Pinturault.

A Chavanod encore, Oklö assemble les 80 éléments de ses vélos cargos compacts et cite leur provenance, en toute transparence. Seul le baquet avant est français : sa structure aluminium est cintrée et soudée à Saint-Étienne et le plancher bois est en châtaignier de France, mis en forme à Annecy. Humble mais déterminée, la marque de VAE plaide pour une relocalisation : « Pour le moment, nous ne pouvons pas proposer un cadre fabriqué en Europe (…Mais les choses évoluent doucement et il se pourrait qu’une filière se développe de nouveau sur le vieux continent. »

 

Coups de pouce pour un changement de braquet

Pour aider les particuliers à acquérir un VAE, les dispositifs d’aide à l’achat ont pris de l’ampleur dans tout l’Hexagone. Sous conditions de revenus, une subvention peut être attribuée aux habitants de La Motte Servolex, en Savoie (150€) ou à ceux de Marignier, en Haute-Savoie (100€). La Ville d’Aix-les-Bains fait bénéficier d’un bon d’achat de 250 €, cumulable avec la prime de 200 € proposée par Grand Lac. Une aide de l’État peut compléter celle de la collectivité territoriale, mais ce bonus VAE (https://www.asp-public.fr/) ne peut excéder le montant de l’aide accordée par la collectivité locale et ne peut dépasser 200 €.

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